« Générations » – Sénaillé, Leclair
À la croisée des écoles italienne et française, Leclair et Senaillé furent en quelque sorte les Paganini du XVIIIe siècle français. Virtuoses autant que poétiques, toujours formidablement rythmées et dansantes, leurs sonates trouvent sous les doigts de Théotime Langlois de Swarte et William Christie deux ardents défenseurs. Par-delà les générations, le grand maître de la musique baroque et le jeune prodige du violon unissent leurs voix pour nous faire redécouvrir ces pages encore injustement méconnues.
« Pour constituer ce programme, j’ai lu toutes les sonates pour violon écrites en France au début du XVIIIe siècle et conservées à la Bibliothèque nationale de France – qui, pour la plupart, sont encore inédites. En découvrant la sixième sonate en sol mineur n°6 du premier livre, j’ai eu un véritable coup de foudre artistique. Cette musique avait un incroyable potentiel dramatique que j’ai immédiatement associé à William Christie, dont le sens théâtral m’a toujours fasciné. » Théotime Langlois de Swarte
« Les choses se passent entre Théotime et moi d’une façon extrêmement naturelle. J’ai mon style au clavecin, un attachement à un certain son, mais nous partageons la découverte de l’œuvre de Senaillé, un maître qui s’était endormi depuis un long moment. Théotime amène son intelligence, son enthousiasme et son savoir-faire. (…) Dans le milieu de la musique ancienne règne une certaine camaraderie : on aime cette musique peut-être plus que d’autres et on partage ce sens de la découverte. À l’issue de cette expérience, je me sens tout simplement rajeuni. C’est là la beauté de la musique. » William Christie
William Christie, clavecin
Claveciniste, chef d’orchestre, musicologue et enseignant, William Christie est l’artisan de l’une des plus remarquables aventures musicales de ces trente dernières années. Pionnier de la redécouverte de la musique baroque, il a révélé à un très large public le répertoire français des XVIIe et XVIIIe siècles. La carrière de ce natif de Buffalo, formé à Harvard et à Yale, installé en France depuis 1971, a pris un tournant décisif lorsqu’il a créé en 1979 Les Arts Florissants.
A la tête de cet ,ensemble instrumental et vocal, William Christie a imposé très vite, au concert et sur la scène lyrique, une griffe très personnelle comme musicien et comme homme de théâtre, renouvelant l’interprétation d’un répertoire jusqu’alors largement négligé ou oublié. C’est en 1987 qu’il a connu une véritable consécration publique avec Atys de Lully à l’Opéra Comique, production qui a ensuite triomphé sur de nombreuses scènes internationales.
Une prédilection pour le baroque français jamais démentie
De Charpentier à Rameau, en passant par Couperin, Mondonville, Campra ou Montéclair, William Christie est le maître incontesté de la tragédie-lyrique comme de l’opéra-ballet, du motet français comme de la musique de cour. Mais son attachement à la musique française ne l’empêche pas d’explorer d’autres répertoires européens : nombre de ses interprétations de la musique italienne (Monteverdi, Rossi, Scarlatti, Landi) ont fait date, et il aborde tout autant Purcell et Handel que Mozart, Haydn ou Bach.
En tant que chef invité, William Christie dirige souvent dans des festivals d’art lyrique comme Glyndebourne (notamment pour Hipermestra en 2017 et Giulio Cesare en 2018) ou des maisons d’opéra comme le Metropolitan Opera de New York, l’Opernhaus de Zurich ou l’Opéra national de Lyon. Entre 2002 et 2007, il a été régulièrement chef invité de l’Orchestre Philharmonique de Berlin.
Son abondante production discographique (plus de 100 disques couronnés de nombreux prix et distinctions en France et à l’étranger) enregistrée pour harmonia mundi, Warner Classics/Erato et Virgin Classics témoigne aussi de la richesse de son activité artistique. Récemment sont parus dans la collection « Les Arts Florissants » chez harmonia mundi : la Messe en si, Le Couronnement de Poppée, « N’espérez plus, mes yeux » et « Générations ».
La formation et l’insertion professionnelle des jeunes artistes
William Christie a révélé en vingt-cinq ans d’activités plusieurs générations de chanteurs et d’instrumentistes. C’est d’ailleurs aux Arts Florissants que la plupart des directeurs musicaux d’ensembles baroques français ont commencé leur carrière. Professeur au Conservatoire National Supérieur de Musique de Paris en charge de la classe de musique ancienne de 1982 à 1995, il est fréquemment invité à diriger des masterclasses et des Académies comme celle d’Aix-en-Provence ou d’Ambronay.
Soucieux d’approfondir son travail de formateur, en 2002 il fonde l’Académie baroque du Jardin des Voix, désormais en résidence dans son village de Thiré, en Vendée. Les lauréats, après une tournée avec Les Arts Florissants en France, en Europe et aux États-Unis, entament rapidement leur carrière internationale. Parmi les lauréats du Jardin des Voix découverts par William Christie, on retrouve Sonya Yoncheva, Christophe Dumaux, Emmanuelle de Negri, Marc Mauillon, Amel Brahim-Djelloul ou encore Lea Desandre et Eva Zaïcik
La reconnaissance d’une carrière exceptionnelle
William Christie a acquis la nationalité française en 1995. Il est commandeur dans l’Ordre de la Légion d’Honneur ainsi que dans l’Ordre des Arts et des Lettres et Grand Officier de l’Ordre National du Mérite. Il est Docteur Honoris Causa de la State University of New York à Buffalo et de la Juilliard School. En novembre 2008, William Christie a été élu à l’Académie des Beaux-Arts et a été reçu officiellement sous la Coupole de l’Institut en janvier 2010. Il a en outre reçu le Prix Georges Pompidou 2005 ainsi que le Prix de chant choral Liliane Bettencourt décerné par l’Académie des Beaux-Arts en 2004. En 2018, il est nommé ambassadeur du rayonnement de la France dans le monde par le Bureau Export, en présence de la Ministre de la Culture, Madame Françoise Nyssen.
Théotime Langlois de Swarte, violon
Passion et éclectisme définissent les choix de répertoire de Théotime Langlois de Swarte qui s’étend du XVIIe siècle jusqu’à la création contemporaine.
Il est le premier violoniste baroque à être nommé aux Victoires de la Musique Classique 2020 dans la catégorie « Révélation soliste instrumental », une reconnaissance pour son travail au sein de multiples ensembles baroques, particulièrement en France: Ensemble Jupiter (Thomas Dunford, Jean Rondeau, Bruno Philippe et Léa Desandre), Les Ombres (Margaux Blanchard, Sylvain Sartre), Pulcinella (Ophélie Gaillard), Marguerite Louise (Gaëtan Jarry) et Les Arts Florissants, avec William Christie qui l’invite régulièrement à jouer avec lui en récital violon et clavecin et en soliste avec l’ensemble.
Après des études au Conservatoire National Supérieur de Musique et de Danse de Paris (CNSMDP) dans la classe de Michaël Hentz, Théotime fonde l’ensemble Le Consort avec le claveciniste Justin Taylor en 2015. L’ensemble est très vite reconnu comme l’un des plus importants de sa génération ; il collabore avec des artistes lyriques tels que Eva Zaicik, Véronique Gens et Mathias Vidal. Leurs enregistrements pour Alpha Classics/Outhere sont récompensés par la presse : Choc Classica (Venez Chère Ombre) et Diapason d’Or de l’année 2019 (Opus 1).
Ses concerts le mènent dans le monde entier dans des salles prestigieuses comme la Philharmonie de Berlin, le Musikverein de Viennes, le Shanghai National Art Center, le Walt Disney hall de Los Angeles ou, plus récemment, à la Philharmonie de Paris où il donne un récital sur le violon « Davidoff » Stradivarius, conservé au Musée de la Musique.
Ses interprétations font régulièrement l’objet de captations par Culturebox (Concerti de Leclair au Festival de Sablé sur Sarthe, Sept Particules au festival de Deauville, Affects Baroques avec Eva Zaicik à la Salle Cortot, Concertos de Vivaldi avec l’Ensemble Jupiter). 2020 marque le début de sa collaboration en tant que soliste avec le label harmonia mundi : il enregistre son premier CD ‘Mad Lover’ consacré à la musique anglaise avec le luthiste Thomas Dunford, suivi de la sonate No 1 de Gabriel Fauré en duo avec le pianiste Tanguy de Williencourt sur le violon « Davidoff ».
Théotime Langlois de Swarte est lauréat de la fondation Banque Populaire et de la Jumpstart Foundation. Il joue sur un violon de Jacob Stainer de 1665.